pratiquer l'IEF avec plusieurs jeunes enfants

On me demande de temps en temps comment s'organiser pour pratiquer l'IEF avec plusieurs enfants de moins de 6 ans. Je vais donc tenter de répondre à la question, car c'est une situation que nous avons déjà connue. Mais il ne s'agit que d'une réponse parmi d'autres. ;)

Avant 6 ans, il faut savoir qu'il n'y a aucune obligation d'instruction, aucune déclaration à faire, donc aucun contrôle. Je connais des familles qui choisissent de laisser une grande liberté à leurs enfants, tout en leur proposant des activités non-scolaires variées et en répondant à leurs demandes (parfois très scolaires). Les enfants suivent la vie de la famille, quel que soit leur âge, quitte à transporter les plus petits en écharpe ou en poussette. Chacun vaque à ses occupations, ensemble ou séparément.

Certaines familles sont très proches de la nature : les enfants s'occupent du potager et cuisinent, prennent soin des animaux de la ferme, se baladent en forêt, apprennent à pêcher, construisent des cabanes, etc. D'autres sont plus citadines : elles visitent les musées, vont à la bibliothèque, au théâtre, participent à des ateliers (arts plastiques, couture, poterie...), sont inscrites à des activités sportives, font des rencontres non-sco (ou pas), etc. L'idéal serait de pouvoir apporter les deux.

Je pense que proposer des choses comme ça aux enfants, c'est bon dans tous les cas, même si on ne choisit pas d'opter pour des apprentissages aussi libres. Personnellement, pour diverses raisons, nous ne pouvons proposer uniquement cette façon de vivre. Nous faisons donc un mix de différentes pédagogies. Un peu de unschooling, un peu de Montessori, un peu de Freinet et d'autres choses plus traditionnelles, telles que des cahiers du commerce ou des ressources téléchargées sur le net.

Nous n'avons pas d'horaire fixe pour "travailler", même si c'est généralement en matinée. Ma fille de 4 ans a accès à tous les supports dès qu'elle en ressent le besoin. Nous avons une salle de classe (ou atelier), mais nous n'y sommes pas cantonnées. Tous les jours d'école, je lui propose de faire une activité avec moi, mais je n'impose aucun travail. Je pense qu'un jeune enfant n'apprend rien sous la contrainte ; ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a aucune contrainte. Il y a notamment la contrainte d'utiliser le matériel correctement et de le ranger, de terminer un coloriage avant d'en prendre un autre...

Je pense vraiment qu'un enfant de moins de 6 ans n'a pas besoin de cours par correspondance (CPC). Il serait bon de pouvoir suivre son rythme et ses centres d'intérêts et non l'obliger à travailler telle ou telle notion à un moment choisi par quelqu'un qui ne le connaît pas et qui ne connaît pas le rythme de la famille. Dans le cas d'une famille avec plusieurs jeunes enfants, la contrainte d'un CPC pourrait mettre une pression difficile à assumer pour tout le monde. Evidemment, ça dépend beaucoup des enfants. Certains enfants vont très bien s'adapter aux CPC, mais si ce n'est pas le cas, ou si la famille n'a pas le temps ou l'organisation nécessaire, il y a bien d'autres moyens d'amener les enfants aux apprentissages.

Quand ma fille ne veut pas faire une "activité" (rarement, car pour elle, travailler est amusant), je lui propose de faire un jeu à la place... et soit elle apprend par le biais du jeu, soit cela lui donne envie de prendre ensuite une activité plus scolaire (plus "intellectuelle"). Parfois, je l'oriente vers une activité ou, au lieu de lui laisser un choix total, je lui demande si elle préfère faire telle ou telle activité. 

Si l'enfant est dans un contexte qui lui offre la possibilité d'apprendre, il apprendra. A nous de lui apporter ce contexte.

Bon, cela étant dit et quel que soit le choix d'instruction, dans une famille nombreuse avec des bébés, il reste important de trouver du temps pour s'occuper des enfants plus grands, sans que les petits interfèrent trop.

Voici donc des pistes :

- faire des activités pendant la sieste des tout-petits (celle du matin ou de l'après-midi : oui, il est possible d'avoir des moments de forte concentration l'après-midi aussi, si l'enfant n'est pas fatigué.)

- utiliser l'écharpe de portage pour calmer les petits dormeurs, tout en ayant les mains libres.

- laisser les tout-petits à un tiers pendant deux heures ou plus, régulièrement : grands-parents, assistante maternelle, crèche, babysitter, etc. Et oui, ce n'est pas parce qu'on fait l'IEF que nous n'avons pas le droit de confier nos enfants. Ca peut être un plus pour tout le monde. Pour les parents de bébés aux besoins intenses, ça me semble être une vraie nécessité.

- si rien de tout cela n'est possible, il reste peut-être envisageable de faire un coin spécial pour les tout-petits : une sorte de grand parc dans lequel ils peuvent se mouvoir librement près de nous, avec des activités pour eux. Evidemment, ça n'est pas efficace très longtemps, mais si ça peut libérer 15 ou 30 minutes une ou deux fois par jour, c'est déjà beaucoup. Il ne s'agit pas de transformer le parc en prison. ;)

Lorsque les enfants ont atteint l'âge où ils sont capables de jouer tranquillement plusieurs minutes sans toucher à tout (ce qui est très variable d'un enfant à l'autre), on peut alors leur préparer un meuble avec des activités pour eux et leur expliquer qu'ils ont le droit de choisir ce qu'ils veulent dans ce meuble et jouer à côté de nous.

Vous pourrez alors :

- vous occupez de l'un ou de l'autre alternativement

- proposer des activités en commun avec des petites adaptations (par exemple, là où le petit collera des gommettes librement, le grand les collera selon une consigne précise).

Ce qui est parfois difficile au début, c'est que le grand reste concentré sur ses activités de grand. Je pense honnêtement que, dans la plupart des cas, ce n'est qu'une période. Le grand ne tardera pas à en avoir marre de jouer à des activités de "bébé" s'il est autorisé à le faire. Il sera sûrement utile de lui laisser du temps pour cette petite régression, sans lui faire de réflexions désagréables. Il faut se rappeler que même lui est très jeune, que ce n'est pas que parce que pendant trois semaines, il ne va rien faire de ce que vous aviez prévu, que cela va gâcher son évolution. Si ça se trouve, au bout de ces trois semaines, il va progresser d'un seul coup, parce que justement, on lui aura permis de vivre ce dont il avait besoin pour grandir. ;)

Voilà. J'espère avoir apporté des éléments de réponses aux familles en demande. N'hésitez pas à vous exprimer sur ce sujet si vous avez d'autres pistes ou à poser de nouvelles questions si nécessaire.